A deux jours du premier tour de l’élection présidentielle, l’attentat jeudi soir sur les Champs-Elysées à Paris, où un policier a été tué, a bouleversé le dernier jour de la campagne officielle et envenimé les débats vendredi.
– Un grand oral bousculé, des déplacements annulés
L’émission « Quinze minutes pour convaincre », jeudi soir sur France 2, devait être l’occasion pour les onze candidats de rassurer sur leurs programmes respectifs ou rallier les indécis. Mais l’attaque visant des policiers sur l’avenue emblème de Paris a bousculé une bonne partie de l’émission.
Marine Le Pen et François Fillon ont annulé leurs déplacements ou réunions publiques prévus vendredi, suivis par Emmanuel Macron. Tous trois ont opté pour des déclarations solennelles vendredi depuis leurs QG.
– Le Pen et Fillon très critiques
La candidate FN a lancé que « depuis dix ans, sous les gouvernements de droite et de gauche, tout a été fait pour que nous perdions » la « guerre » contre le terrorisme. Marine Le Pen a aussi demandé « solennellement » au chef de l’État « d’ordonner la restauration effective de nos frontières » et « le traitement administratif ou pénal immédiat des fichés S ».
Tout en prônant l’unité pour montrer que la France « n’a pas peur », le candidat de la droite a estimé que « certains n’ont semble-t-il pas encore totalement pris la mesure du mal qui nous agresse et que j’entends combattre d’une main de fer ».
Emmanuel Macron a dénoncé la « faute » de François Fillon qui lorsqu’il était Premier ministre a provoqué selon lui « l’affaiblissement du renseignement territorial ». Être président « ça ne consiste pas comme je le vois ici ou là à céder à quelques surenchères, pour répondre à l’événement tragique qui endeuille notre pays », a-t-il ajouté.
– Cazeneuve rejette « outrance et division »
Sur le perron de Matignon, Bernard Cazeneuve a accusé Marine Le Pen et François Fillon d’avoir choisi « l’outrance et la division », accusant en particulier la candidate FN de chercher à « exploiter sans vergogne la peur et l’émotion à des fins exclusivement politiciennes ».
Le Premier ministre, qui avait estimé plus tôt que « rien ne doit entraver ce moment démocratique fondamental » qu’est l’élection présidentielle, a appelé « solennellement » à la « responsabilité », à être « collectivement à la hauteur » et au « refus des postures ».
– Mélenchon appelle au « sang-froid »
Le candidat de La France insoumise a demandé à ses concurrents de respecter leur « devoir de sang-froid », d' »éviter les polémiques grossières et vulgaires » et de ne pas critiquer la gestion des événements par le gouvernement actuel, dans un message vidéo sur Facebook.
Il a maintenu son « apéro insoumis » prévu en fin de journée dans le quartier de Ménilmontant à Paris, où devait le rejoindre le leader de Podemos, l’Espagnol Pablo Iglesias.
– L’appel de Carmaux de Hamon
Le candidat socialiste, pour qui cela aurait été « une grave erreur » de « mettre entre parenthèses le débat démocratique », a déclaré à Carmaux (Tarn) que les terroristes « veulent nous jeter dans les bras de la haine et de la guerre civile ». Mais « nous ne cèderons rien », a assuré Benoît Hamon sur les terres de Jean Jaurès, souhaitant « encore plus » de liberté, d’égalité, de fraternité et de République.
– Quelles conséquences dans les urnes?
Le président américain Donald Trump considère que l’attentat « aura un gros effet sur l’élection présidentielle ». Les experts sont beaucoup plus prudents.
Un sondage Ifop-Fiducial pour Paris Match, CNews et Sud Radio réalisé de mardi à vendredi, avant et après l’émission politique et l’attentat, laisse Emmanuel Macron en tête avec 24,5% des intentions de vote (+0,5% par rapport au sondage réalisé de lundi à jeudi), devant Marine Le Pen à 22,5% (stable). François Fillon est crédité de 19,5% devant Jean-Luc Mélenchon (18,5%) et Benoît Hamon (7%).
Dans la classe politique, on estime « vraisemblable » une hausse de la participation en réaction à l’attaque terroriste.
– Ken Loach avec Poutou
Des personnalités et dirigeants politiques d’une vingtaine de pays, dont le réalisateur britannique Ken Loach et l’eurodéputé de Podemos Miguel Urban, ont signé un appel en soutien à la candidature de Philippe Poutou (NPA), « seul candidat qui défend une position de démocratie par en bas ».
Avec AFP