La justice a demandé au Parlement européen de lever l’immunité de Marine Le Pen

Crédit AFP – By PASCAL LACHENAUD

A neuf jours de la présidentielle, le calendrier des affaires continue de se télescoper avec la campagne: la justice a demandé la levée de l’immunité d’eurodéputée de Marine Le Pen, visée par une enquête sur des soupçons d’emplois fictifs d’assistants du Front national au Parlement européen.

Les juges d’instruction financiers ont adressé des demandes de levée d’immunité parlementaire de Marine Le Pen et d’une autre députée européenne frontiste, Marie-Christine Boutonnet, qui ont été signées respectivement les 29 et 30 mars, a affirmé vendredi une source judiciaire à l’AFP, confirmant une information d’Europe 1.

« C’est normal, c’est la procédure tout à fait classique, je suis pas étonnée », a réagi la candidate du parti d’extrême droite à la présidentielle sur franceinfo.

Son avocat Rodolphe Bosselut s’en est en revanche « étonné » auprès de l’AFP, « puisqu’il y avait l’engagement pris par Marine Le Pen de se présenter devant les juges après les législatives, sous réserve des résultats de l’élection présidentielle ».

La demande des juges ne devrait quoi qu’il en soit pas aboutir avant le scrutin: en 2016, l’examen de la quinzaine de demandes de levée d’immunité reçues au Parlement européen a pris entre quatre et huit mois. Les demandes des juges français ont été adressées au parquet de Paris puis au parquet général, qui les transmet, comme le veut la procédure, à la Chancellerie avant d’être envoyées au Parlement européen.

Selon une source proche du dossier, elles ne sont pas encore arrivées devant la commission des affaires juridiques du Parlement, chargée de se prononcer pour ou contre la levée de l’immunité lors d’un vote au terme d’un débat, avant un second vote décisif en assemblée plénière.

– « Parler de politique » –

La présidente du FN devrait vraisemblablement être convoquée au cours de cette procédure pour s’expliquer devant les eurodéputés de cette commission.

Dans cette affaire, les enquêteurs cherchent à savoir si le Front national a organisé un système pour rémunérer des permanents du parti avec des fonds publics de l’Union européenne, via ces contrats d’assistants au Parlement européen. Le parquet de Paris a mené une enquête préliminaire, avant de confier le dossier aux juges d’instruction en décembre dernier.

Les juges ont déjà mis en examen pour « recel d’abus de confiance » deux assistants parlementaires, Charles Hourcade, un temps employé comme graphiste au siège du parti à Nanterre, ainsi que Catherine Griset, recensée comme cheffe de cabinet de Marine Le Pen au FN.

La candidate frontiste, qui reste dans le duo de tête des intentions de vote pour le premier tour malgré un récent tassement, avait invoqué son immunité de députée au Parlement de Strasbourg pour refuser de se rendre, le 10 mars, à une convocation des juges en vue d’une possible mise en examen dans ce dossier. Vendredi, elle a assuré ne pas regretter de ne pas avoir répondu aux juges et ne plus souhaiter parler de cette affaire. « Je voudrais parler de politique », a-t-elle lâché.

Marine Le Pen avait fait savoir par avance qu’elle ne se rendrait à aucune convocation avant la fin des échéances électorales. L’eurodéputée Marie-Christine Boutonnet ne s’était pas non plus rendue à sa convocation chez les juges financiers début mars.

Le candidat de la droite à l’Elysée, François Fillon, dont la campagne est également empoisonnée par l’affaire judiciaire sur des soupçons d’emplois fictifs de son épouse et de ses enfants comme assistants parlementaires, avait lui choisi de se rendre chez les juges tout en dénonçant une « machination ».

Contrairement à un justiciable ordinaire, les juges d’instruction n’ont pas la possibilité de contraindre les députés européens à se présenter devant eux. Pour toute mesure de coercition, ils doivent d’abord obtenir la levée de leur immunité auprès du Parlement européen, comme cela a été effectué dans un autre dossier instruit par des juges d’instruction à Nanterre, où il est reproché à la présidente du FN d’avoir diffusé des images d’exactions du groupe jihadiste Etat islamique (EI) sur Twitter.

Avec AFP

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