Marine Le Pen doit annoncer jeudi si elle est candidate ou non aux législatives dans son fief d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), au moment où le Front national est en plein trouble, après sa performance à la présidentielle, jugée décevante par certains en interne.
Comme en 2007, où elle avait sauvé l’honneur du FN en pleine déconfiture électorale avec 41,6% au 2e tour, comme en 2012, où elle avait échoué à une centaine de voix près au second tour, la présidente du FN pourrait être candidate dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais, là où Steeve Briois, l’un de ses très proches, est maire d’Hénin-Beaumont.
Des informations contradictoires circulaient dans son entourage sur un éventuel déplacement sur place dans la journée, avant une intervention au 20 heures de TF1.
Si Mme Le Pen était candidate, le scrutin pourrait presque passer pour une formalité: au second tour de la présidentielle, la candidate FN a recueilli dans cette circonscription 58,17% des suffrages exprimés face à Emmanuel Macron, son sixième meilleur score de France.
Mais l’enjeu est autre pour la patronne du FN. Il s’agit de trouver la meilleure place pour incarner son statut d’autoproclamée « cheffe de l’opposition » à Emmanuel Macron: au Parlement européen ou à l’Assemblée nationale?
En interne, il s’agit aussi d’ajuster son costume de patronne du FN.
Marine Le Pen a pulvérisé au premier comme au second tour de la présidentielle les records en pourcentages et en voix du FN, et pourtant, elle n’est plus tout à fait la cheffe incontestée du parti qu’elle était avant le débat d’entre deux-tours face à Emmanuel Macron, jugé raté jusqu’au sein du FN, et les 33,9% décevants le soir du 7 mai.
Depuis l’élection, les mauvaises nouvelles s’enchaînent pour Mme Le Pen: sa nièce, Marion Maréchal-Le Pen, a annoncé son retrait de la vie politique, la privant d’une forte locomotive dans le Sud-est, région stratégique pour le FN.
L’alliance avec Nicolas Dupont-Aignan, célébrée dans l’entre deux-tours comme un tournant de la campagne, a viré au fiasco: les deux partis, d’après lui « concurrents » mais aussi « partenaires » face au nouveau chef de l’Etat, iront séparément au premier tour des législatives, avant d’éventuels soutiens « au cas par cas » au second tour.
Au sein même du Front national, dans l’attente d’un congrès potentiellement fratricide fin 2017 ou début 2018, on cherche le responsable de l’échec. Si ce n’est pas Mme Le Pen, c’est son bras droit Florian Philippot qui concentre les critiques.
L’annonce par ce dernier de la création dans la semaine d’une association « au sein du FN » baptisée « Les Patriotes » a été perçue comme un geste hostile par certains frontistes de poids, tout comme sa déclaration selon laquelle il quitterait le parti si celui-ci abandonnait l’idée de sortie de l’euro.
« Chantage », a taclé Nicolas Bay, numéro trois du parti. Critique aussi, l’eurodéputé Gilles Lebreton a indiqué mercredi qu’il « oeuvrerait après les élections à l’indispensable rénovation du FN ».
– Objectifs revus en baisse –
Il y a encore quelques semaines, Marine Le Pen disait pouvoir obtenir une majorité parlementaire en cas de victoire à l’Élysée.
Les objectifs de la « cheffe naturelle de cette opposition, cheffe de file de la bataille législative », selon les mots du directeur de campagne Nicolas Bay, sont désormais fortement revus à la baisse.
Pour lui, pas de majorité FN à prévoir : « Ceux qui veulent faire croire qu’ils pourront demain imposer une cohabitation à Macron bernent un peu nos compatriotes » a-t-il indiqué lundi, en référence aux objectifs des Républicains.
L’ambition est désormais selon M. Bay d' »assurer une entrée massive » au Palais Bourbon, où ne siègent actuellement que deux députés FN, Marion Maréchal-Le Pen et Gilbert Collard.
Au vu des résultats électoraux du parti, et malgré un mode de scrutin majoritaire à deux tours qui lui a souvent été fatal, un groupe serait un minimum pour le parti, que Marine Le Pen soit candidate ou pas.
Mais avec un groupe éventuel à l’Assemblée nationale, et une importante délégation au Parlement européen, Mme Le Pen pourrait aussi avoir à choisir quel est le meilleur endroit pour tenir ses troupes.
Avec AFP