Immigration, sécurité, anti-système : les clefs du vote Le Pen

Crédit AFP – By joel SAGET

Aux quatre coins de France, les thèmes de l’extrême droite française – immigration, sécurité, rejet du « système » et de la mondialisation, etc. – résonnent chez de nombreux électeurs rencontrés par l’AFP qui confient souvent leur peur du déclassement.

« Les Français ont le sentiment d’être dépossédés de leur identité, de leur système de protection sociale, de leur souveraineté », argumente la patronne du Front national (FN) Marine Le Pen, que les sondages donnent qualifiée au second tour de la présidentielle, à l’issue du premier tour organisé dimanche.

– L’immigration, thème-clé –

« Il faut que ça cesse » : le discours anti-immigrés, « pour les patriotes » constitue le cœur du programme du Front National.

« Je ne suis pas raciste, mais quand je vois nos parents travailler comme des chiens et rester sans rien à la fin du mois, pendant que des Arabes sans emploi se baladent avec des Iphones… On ne veut pas être au-dessus des autres, on veut juste l’égalité », explique Yoan Jenais, 19 ans, vendeur sur les marchés dans le Sud de la France, où le FN est solidement implanté.

A La Roche-sur-Yon (ouest), Danièle Pubert, femme de ménage à la retraite de 65 ans, est elle aussi décidée à voter Front national « pour un grand changement » car « nous les Français, on n’est plus prioritaires ».

« Avec l’immigration et l’islamisation, on va perdre notre identité », craint Roger, 70 ans, professeur agrégé de mathématiques croisé dans un meeting Le Pen à Paris.

« Marine, elle serait capable de remettre le pays sur pied. Les migrants c’est des malheureux, mais des gens d’ici sont dans la précarité, il faut les aider en priorité sinon c’est une injustice », tranche Dorothée, 38 ans, gardienne de prison à Bapaume, dans le nord de la France.

– Attentats et insécurité –

Avec les attentats qui ont fait 238 morts en France depuis janvier 2015, la sécurité et la lutte contre le terrorisme figurent parmi les principales préoccupations des Français. Une aubaine pour l’extrême droite, pour laquelle l’insécurité est un thème-phare.

« Avec moi, il n’y aurait pas eu les terroristes migrants du Bataclan et du Stade de France » de novembre 2015, assure Mme Le Pen.

« L’attentat m’a décidé », affirme André, 48 ans. Pour la première fois, il votera FN à la présidentielle, comme d’autres habitants de Nice, ville méditerranéenne encore sous le choc de l’attaque djihadiste au camion-bélier qui a fait 86 morts le 14 juillet 2016.

Selon la section locale du Front national, il y a eu un « boom de 10% des adhésions après l’attentat, puis une augmentation progressive dans les semaines suivantes ».

– Le rejet du ‘système’ –

« J’étais de gauche comme plein de gens ici, mais j’ai viré de bord, j’ai pas honte de le dire. Je ne veux ni de la gauche ni de la droite. On a été trahi, volé, spolié », confie Elisabeth Develter, 70 ans, ancienne employée de supermarché à Hénin-Beaumont, une ville du nord de la France qui a élu un maire FN en 2014.

« Les politiques, c’est fripouille et compagnie », renchérit Francis, 80 ans, mineur retraité installé à Carmaux (sud), frontiste de longue date. Le discours « antiélites », « antisystème » lui plaît. Et les démêlés judiciaires de sa candidate ne semblent pas l’émouvoir.

« Moi je suis pour Marine. C’est la seule qu’on n’ait pas essayée », affirme Michel Cadour, 58 ans, chauffeur de poids lourds. « Les politiciens s’en foutent, du vote rural », selon cet habitant de Varzy, petite commune à 200 km au sud de Paris.

– Laissés-pour-compte de la mondialisation –

En France, le chômage reste massif malgré un léger reflux en 2016 : 3,45 millions de demandeurs d’emploi (9,7%). Les promesses des précédents présidents, Nicolas Sarkozy comme François Hollande, sont restées lettre morte.

La patronne du FN, quant à elle, dit parler au nom de ces « Français oubliés », sans emploi ou vivant dans la précarité. Et promet de sortir de la zone euro pour relancer l’emploi.

Dans le village de Brousseval (est), le choix est déjà plié pour la majorité des ouvriers de la fonderie qui tourne depuis 1830 : « J’ai voté Sarkozy, on n’a rien eu, j’ai voté Hollande on n’a rien eu, alors je voterai Le Pen et on verra bien, explique Pasa Ertugrul, 29 ans. Dans le coin, les usines ferment, alors elle est où, l’évolution de la France ? Après, qu’elle soit raciste ou pas, c’est son problème ».

A Aulnay-sous-Bois, banlieue parisienne encore marquée par la fermeture des usines en 2013, « c’est notre électorat qui est parti, les bas salaires, les ouvriers, qui votent Marine Le Pen sans complexe », se désespère Tahar, un militant socialiste.

Avec AFP

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