Alors qu’approche la présidentielle, ceux qu’on appelle les primo-votants veulent peser dans le scrutin : encore indécis, ils sont taraudés entre les choix radicaux comme le FN ou la France Insoumise, ou veulent parier sur les « nouvelles » forces politiques.
« Je ne dirais pas que le FN est extrême. On est différents, comme les macronistes peuvent l’être ». Eric, un boulanger de 20 ans dit s’être « intéressé à beaucoup de partis, notamment à l’extrême gauche. En termes purement idéologiques ça me plaisait, mais pas dans la forme. Finalement je me suis reconnu dans le Front ».
En mars, un sondage Ifop qui ciblait les 18-25 ans estimait qu’ils allaient d’abord voter pour Marine Le Pen (29%) ou Emmanuel Macron (28%). Jean-Luc Mélenchon recueillant 14,5% de leurs intentions de vote.
Près d’un sur deux (48%) avait alors l’intention de s’abstenir.
Vendredi, un sondage Ifop-Fiducial sur la population française cette fois, plaçait, pour la seule catégorie des 18-24 ans, le candidat de la France Insoumise en tête avec 30% des intentions de vote, devant Marine Le Pen (22%) et Emmanuel Macron (20%).
Mais, selon ce même sondage,à les interroger sur leur préférence dans l’isoloir, les jeunes ne sont que 55% à être sûrs de leur choix, soit la catégorie la plus indécise.
Le vote FN chez les jeunes est bien ancré, souligne la sociologue Anne Muxel. « On oublie qu’en 2002, 18% des 18-24 ans ont voté pour Marine Le Pen au premier tour ».
« Il y a chez eux une très forte défiance à l’égard de la politique, une crise des partis politiques de gouvernement et donc une volonté de se reporter sur des forces politiques soit hors système, soit nouvelles », poursuit la chercheuse du Cevipof.
Une analyse partagée par Gaëtan Dussaussaye, responsable des Jeunes avec Marine, qui estime qu’ils sont « en recherche d’une véritable alternative politique ». « Les jeunes ne croient absolument plus dans le clivage gauche-droite, certains votent Mélenchon, certains votent FN, certains votent Macron », poursuit le jeune homme de 23 ans.
Si le parti réfute toute « stratégie », le FN a présenté des candidats jeunes aux élections, aux premiers rangs desquels Marion Maréchal-Le Pen, benjamine de l’Assemblée nationale à 27 ans.
– youtubeurs –
« L’idée qu’il y a +un manque d’intérêt pour la politique+, c’est une analyse complètement fausse. Les jeunes sont bien renseignés, notamment par certains youtubeurs. Quand ils prennent la décision de s’abstenir, ils savent exactement pourquoi », selon le jeune frontiste.
Osons Causer, Minute papillon, Usul, Hugo Décrypte… les youtubeurs, dont certains font plusieurs centaines de milliers de vues, sont souvent plus convaincants auprès de cette frange de la population.
Un phénomène bien compris par Jean-Luc Mélenchon, qui, avec sa chaîne Youtube et son offensive sur les réseaux sociaux, comptabilise plus de 280.000 abonnés.
Un an après la mobilisation contre la loi travail, « une génération s’était retrouvée dans la rue, et une forme de politisation de la jeunesse s’était fait jour », rappelle Thomas Kekenbosh, du Mouvement des Jeunes socialistes.
Mais les partis historiques n’ont pas su capitaliser sur cette « politisation ».
Le mouvement des jeunes avec Macron, qui à 39 ans est le plus jeune des onze candidats, tente d’en tirer parti en insistant sur le positionnement de son candidat en dehors de l’échiquier classique et son « inexpérience » électorale.
« Nous, on assume qu’on a un candidat neuf, jamais élu, alors qu’ils sont en demande de grande moralisation de la vie publique. On incarne la nouveauté », estime Sacha Soulié, co-fondateur du mouvement.
Quant au vote blanc, les jeunes ont parfois du mal à s’y résoudre, frustrés de « renoncer » dès leur baptême des urnes.
« Ca me ferait chier de voter blanc alors que c’est ma première élection », concède Antoine, 19 ans.
Avec AFP