Situation fiscale et éventuels conflits d’intérêts: l’entrée au gouvernement est synonyme d’une série de contrôles, y compris préalables, depuis les affaires Cahuzac et Thévenoud.
L’annonce de la composition du gouvernement d’Edouard Philippe a été retardée à mercredi, l’exécutif invoquant le souci de se donner un « temps de vérification », conformément aux engagements d’Emmanuel Macron « de moraliser la vie publique ».
La procédure et également la pratique ont profondément évolué en quelques années.
Le scandale du compte caché à l’étranger de l’ex-ministre Jérôme Cahuzac a entraîné l’adoption de lois sur la transparence en octobre 2013, prévoyant une vérification de la situation fiscale et des éventuels conflits d’intérêts des nouveaux ministres sitôt après leur nomination.
Cette vérification, en lien avec l’administration fiscale, se fait sous le contrôle de la récente Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), ce qui est une garantie d’indépendance. Auparavant, ce contrôle de la situation fiscale des membres du gouvernement se faisait de façon informelle, sous la responsabilité du ministre du Budget.
C’est ce contrôle qui a entraîné en septembre 2014 la démission de Thomas Thévenoud, qui venait d’être nommé secrétaire d’État, pour n’avoir pas déclaré ses revenus, ou en retard. Poursuivi avec son épouse pour fraude fiscale, il attend son jugement le 29 mai.
En outre, les nouveaux entrants au gouvernement doivent transmettre à la HATVP des déclarations de patrimoine et d’intérêts, qui sont contrôlées puis rendues publiques sur le site de la HATVP.
Par exemple si l’un d’eux détient des portefeuilles d’actions ou autres instruments financiers, il doit en confier la gestion à un mandataire, auquel il ne peut donner d’ordre pendant la durée de ses fonctions pour éviter tout délit d’initié, en vertu des mêmes lois sur la transparence.
Pour parer à un nouveau cas Thévenoud, le président de la Haute autorité, Jean-Louis Nadal, avait suggéré que la situation notamment fiscale et patrimoniale des pressentis au gouvernement soit vérifiée, « au moins en première analyse », préalablement à leur nomination, comme cela se pratique dans d’autres pays.
C’est ce que François Hollande a mis en pratique, de façon informelle, préalablement au remaniement de février 2016, et ce qu’Emmanuel Macron effectue depuis quelques jours.
L’administration fiscale peut indiquer si les pressentis sont à jour – dans le respect du secret fiscal.
Et la HATVP dispose des déclarations d’intérêts ou de patrimoine de près de 15.000 élus et responsables publics. Elle « ne rend pas un avis » à l’exécutif mais « fait une cartographie des risques au regard des informations en sa possession », a indiqué à l’AFP la Haute autorité. Cela peut induire en particulier un changement du portefeuille envisagé, en cas de lien d’intérêt problématique.
En outre, le président de la République a prévu que les ministres signent « un engagement sur l’honneur d’intégrité et de moralité », et communiquent au chef du gouvernement « l’ensemble des intérêts qu’ils ont eu à connaître, au-delà de la période de cinq ans prévue par la loi ».
Les ministres du gouvernement Ayrault en 2012 avaient signé une charte de déontologie, et avant eux ceux du gouvernement Fillon en 2007 dû se conformer à une série d’obligations d’exemplarité.
Avec AFP